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Keny Arkana
16 novembre 2006

Keny Arkana, le missile est lancé

Un premier album

Voilà un nom qu’il faudra retenir à l’avenir : Keny Arkana, rappeuse marseillaise de 23 ans, s’annonce en effet comme la grosse révélation de l’année 2006. Découverte avec son street album L’Esquisse, elle publie son premier album officiel. Entre ciment et belle étoile révèle la maturité d’une plume trempée dans le militantisme mais également capable d’émouvoir, de convaincre et de faire rêver. Un autre rap est possible avec Keny, qui se situe à mille lieux des clichés matérialistes peuplant trop souvent ce milieu. Entretien avec une guerrière altermondialiste.

Keny pour le clip

RFI Musique : Tu te souviens de ton premier texte ?
Keny Arkana :
Je devais avoir 12 ans. Mais je ne me suis jamais dit que j’allais être artiste, c’était un besoin d’écrire, d’extérioriser. Je n’ai jamais trop calculé. En plus j’écrivais en cachette. En foyer, c’était des textes contre les éducateurs, et tous les autres gamins se mettaient à "backer" mes paroles. Après, c’est devenu une passion. Il fallait trouver les bons mots pour dire les choses, et bien les dire. C’était très brut au début, ça l’est toujours un peu, d’ailleurs.

Dans quelles conditions as-tu conçu L’esquisse, ton street album ?
Je faisais partie du collectif Etat Major que j’ai quitté il y a 3 ans. L’univers solo s’est construit petit à petit, et quand il y a eu assez de matière j’ai pu le sortir. J’avais pas mal de morceaux, des gens qui attendaient un disque et on a fait un street album avec les titres dont on savait qu’ils ne seraient pas dans la couleur de l’album. Il y en a aussi plein qu’on a jeté.

Tu te considères comme une artiste ou une militante ?
Dans un morceau je dis que je ne suis pas une rappeuse contestataire mais une contestataire qui fait du rap. Je ne suis pas une rappeuse, je suis une énervée de la vie qui a trouvé un truc positif pour extérioriser et dire les choses. Il y a ceux qui kiffent les battles, les joutes verbales, et ceux qui préfèrent le côté militant Public Enemy. Moi, la compèt’, ça n’est pas mon délire. Le matérialisme ne me convient pas. Je ne vois plus la contestation dans le rap mais des moutons de Babylone qui prônent le capitalisme. Je ne vais pas dire que c’était un mouvement de gauche mais aujourd’hui c’est que des gens de droite, ça c’est sûr ! Sincèrement, le milieu rap, je n’en ai rien à branler. Ils font ce qu’ils veulent, même dans le milieu hip hop, je suis une marginale. Je n’analyse plus le hip hop, ça c’est ton travail, pas le mien.

Tu as une méthode d’écriture ?
C’est des cahiers qui s’empilent. J’aime écrire le soir ou quand je me réveille, sinon je suis trop speed. Je n’ai pas la haine de la fin de journée. Je jette beaucoup, je garde peut-être un texte sur 20 ou 30. J’écris tous les jours depuis 5-6 ans, sauf depuis trois mois, depuis que j’ai signé. J’aime écrire, alors c’est du premier jet ou je jette.

Comment choisis-tu les sons sur lesquels tu poses ?
Si ça me provoque une émotion je le prends, sinon rien. Là non plus, pas de calcul. Mais je n’aime pas trop les sons tendance. Pour l’album il y a plein de beatmakers différents. Des connus, des inconnus, des Parisiens, des Marseillais, des Cannois. Chacun a ses méthodes de travail. Certains c’est MPC samples, d’autres c’est de la compo avec des expanders, d’autres de la programmation et du travail avec des musiciens qu’ils samplent… J’arrive à écrire après la première écoute, quand l’émotion est encore présente.

Keny_Arkana___Entre_Ciment_et_Belle_Etoile__16_10_06_

Apparemment, tu n’aimes pas trop être prise en photo ou vue à la télé…
Pour moi c’est la musique avant tout, le message. Je suis une anonyme dans la masse, avec un haut-parleur. C’est comme ça que je me vois. Je n’aime pas les paillettes qu’on peut mettre autour des artistes, c’est pour ça que je dis que je n’en suis pas une. J’ai envie de mettre en avant ce que je fais, pas ce que je suis. Ceux qui me comprennent savent que la télé, c’est pas mon délire. Comme je le dis dans un texte, “mon rap n’a pas de groupies, juste des frères et sœurs. On est plein de frères et sœurs. Je rappe, je fais de la scène, le reste c’est… un dilemme. Après, ça n’est pas la chose la plus importante à retenir. Je ne joue pas avec ça, je ne suis pas Marcos, en plus on voit mon visage même sur L’esquisse, ma tête circule. On est à une époque où quand tu fais un concert et que tu demandes de lever la main, tu vois plein de portables qui prennent des photos. L’époque fait que l’anonymat n’est plus possible. Je ne me focalise pas là-dessus. Je ne monte pas sur scène avec une cagoule.

Certains vont te trouver des points communs avec Diam’s. Tu es d’accord ?
Oui, je suis d’accord. La grande différence est dans la démarche : elle, elle aime bien se montrer. Mais je ne la juge pas, chacun a ses raisons, moi la mienne me dit de ne pas le faire. On a le même timbre de voix et la même rage derrière le micro, mais on n’a pas le même discours et on ne s’adresse pas aux mêmes personnes. Je ne suis pas là pour vendre du disque mais pour faire passer un message.

Keny Arkana Entre ciment et belle étoile (Because) 2006
En concert le 20 novembre au Nouveau Casino (Paris) et en tournée en France

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